La vérité sur les hybrides de Nepenthes

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Aurélien
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La vérité sur les hybrides de Nepenthes

Message par Aurélien »

Salut,

Ce titre accrocheur me permet de vous causer d'un article qui m'a particulièrement interpellé dans la dernière CPN (44(2), juin 2015).
Heon Sui Peng et notre ami Charles Clarke ont étudié de près les hybrides de Nepenthes en nature et les ont comparés à leurs parents, notamment en ce qui concerne leur faculté à capturer des proies.

Ce papier permet de tordre le cou à pas mal d'idées reçues, en tout cas me concernant. En lisant la littérature sur le genre et en cultivant des Nepenthes, j'ai accumulé pas mal d'a prioris. Notamment que c'est un genre jeune dans l'évolution, prompt à l'hybridation, que les hybrides sont nombreux en nature et qu'ils tendent à supplanter les espèces dans les endroits où ils vivent en sympatrie, du fait de leur vigueur hybride (hétérosis), qui leur prodiguerai un avantage évolutif. De même c'était pour moi une des principales voies de diversification des espèces, comme en atteste nombre d'espèces supposées hybridogènes : N. murudensis (N. muluensis x N. reinwardtiana), N. hamiguitanensis (N. peltata x N. micramphora), N. hurrelliana (N. veitchii x N. fusca), etc.

Eh bien en fait, non.

Déjà, les auteurs notent que si les hybrides sont féconds, très peu de pieds femelles portent des fruits.
Ensuite, Charles Clarke, qui étudie les Nepenthes depuis plusieurs décennies, a relevé des cas connus de stations mêlant plusieurs espèces et leurs hybrides (à hauteur de 10%) dans les années 80. Après quelques perturbations d'origine anthropique, les hybrides ont aujourd'hui complètement disparu, alors que les espèces sont toujours présentes.

Voilà qui ébranle quelques certitudes.

Mais c'est alors que l'article devient intéressant, car il s'attarde sur 4 espèces distinctes avec des modes de capture très poussés et perfectionnés : N. ampullaria, N. rafflesiana, N. bicalcarata, N. gracilis, et leurs hybrides, donc.

Vu que les hybrides sont vraiment des intermédiaires de leurs parents, en terme de taille, de morphologie etc. d'urnes, on pourrait penser que les captures de proies pourraient être intermédiaires.

Non plus.

Il s'avère en général que les proies capturées sont en fait bien moindre (en quantité et en diversité) que chacun de parents, ou au mieux équivalent. Pourquoi ? Prenons l'exemple le plus frappant : N. x cantleyi (N. gracilis x N. bicalcarata).

N. bicalcarata est très particulière, notamment grâce au mutualisme qui la lie à Camponotus schmitzi. Elle possède des urnes épaisses, rugueuses et un péristome plat, solide. Les "dents" sont supposément un mode d'attraction des fourmis commensales, de même que les tendrils creux et épais.

N. gracilis a une adaptation particulière moins connue : son opercule très souple est comme monté sur ressorts et fait facilement chuter dans l'urne les bestioles qui viendraient lécher le nectar sous l'opercule à la moindre goutte de pluie.

L'hybride n'a absolument aucune adaptation viable de ses deux parents : dents pas complètement développées, tendrils trop fins, urnes trop glissantes pour les Camponotus, et opercule rigide : on revient à zéro ; une espèce de Nepenthes sans spécialisation particulière.

Bien sûr, je résume grandement : l’article s'étale sur 18 pages, avec plein de tableaux compliqués et de statistiques obscures, très documenté, riche et vraiment précis. un vrai travail de fond.


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Carni-74
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Re: La vérité sur les hybrides de Nepenthes

Message par Carni-74 »

C'est très intéressant, je suppose que c'est la même chose avec d'autre plantes comme les sarracenia?

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